Bernardin de SIENNE

Bernardin de SIENNE

(? 1444)

écrits

Saint, frère mineur

« Donnez en aumône ce que vous avez et tout sera pur pour vous » (Lc 11, 41)

 

Ne t’ai-je point enseigné que l’aumône se fait avec le cœur, les paroles et les œuvres ? Tu n’auras en ceci jamais d’excuse : quand tu vois la nécessité du pauvre, tu es tenu d’y compatir avec ton cœur.

Lorsque tu vas à l’hôpital et ne peux guérir la peine de l’infirme, accorde-lui du moins l’aumône du cœur : prends-le en pitié. Et tu peux lui en donner une autre, qui lui sera peut-être plus chère : celle de la parole. Par le bienfait de deux paroles, tu allégeras sa peine. Tu ne seras jamais excusé de cette omission. En quelque état ou condition que tu vois l’infortuné, tu peux le consoler. Elle plaît tant au pauvre, l’aumône de la parole que tout aussitôt il se réconforte et s’apaise. Écoute la sainte Écriture : « La rosée ne rafraîchit-t-elle pas le vent brûlant ? » (Si 18,16). Vous souvenez-vous de la sensation que vous éprouvez au temps de la grande chaleur, quand vous trouvez une abondante rosée le matin ? De même parfois, lorsque, ne pouvant assister un miséreux par les biens de ce monde, tu le soutiens de tes paroles ; il semble tout rafraîchi et consolé, bien que tu ne l’aies point soulagé de sa nécessité matérielle. – Mais s’il est sourd, comment lui adresserai-je cette aumône ? – Tu n’est point pour cela excusé : tu peux du moins recoudre ses habits, l’aider à se vêtir, à se chauffer, et t’ingénier selon tes moyens.

Qui sera dispensé de compatir au besogneux ? Personne. Vois dans l’Exode (cf. Ex 23,5) : il t’est commandé si tu vois un âne tomber, fût-ce celui de ton ennemi, d’aider à le relever. Si tu es tenu d’aider l’âne de ton ennemi, que sera-ce du prisonnier ? Tu n’as nulle excuse devant Dieu de ne pas l’assister ! Donne ton aumône dans la joie.

Où il est traité de l’aumône et à qui il convient de la dispenser” (coll. La vie spirituelle, novembre 1922, p. 239-241 ; in Lectures chrétiennes pour notre temps, fiche O47 ; trad. Orval ; © 1972 Abbaye d'Orval)

« Invitez les pauvres »

 

Donne ton aumône dans la joie. Que tout ce que tu fais pour l'amour de Dieu chante l'allégresse et non point l'ennui. Car il est écrit : « Un esprit triste dessèche les os » (Pr 17,22). Ce qui signifie que lorsque le pauvre vient à ta porte et que tu lui tends l'aumône en rechignant, ton mérite est consumé avant même que tu n'aies franchi le seuil. Tu dois la rendre joyeuse par ton cœur, tes paroles, tes œuvres. 

Quand le mendiant arrive chez toi et sollicite une offrande pour l'amour de Dieu, réponds-lui volontiers : « Sois le bienvenu ! » Tu lui témoignes ainsi que ton don est fait dans l'allégresse par ton cœur, tes paroles, ton visage avenant et ton empressement. Un mot accompagnant l'aumône réjouit plus que tu ne le penses. Combien elle devient précieuse quand tu l'offres sans rechigner et que tu le prouves par une douce parole.

Traité sur l'aumône

Joseph, gardien fidèle

 

C'est une loi générale, dans la communication de grâces particulières à une créature raisonnable : lorsque la bonté divine choisit quelqu'un pour une grâce singulière ou pour un état sublime, elle lui donne tous les charismes nécessaires à sa personne ainsi qu'à sa fonction, et qui augmentent fortement sa beauté spirituelle.

Cela s'est tout à fait vérifié chez saint Joseph, père présumé de notre Seigneur Jésus Christ, et véritable époux de la Reine du monde et Souveraine des anges. Le Père éternel l'a choisi pour être le nourricier et le gardien fidèle de ses principaux trésors, c'est-à-dire de son Fils et de son épouse ; fonction qu'il a remplie très fidèlement. C'est pourquoi le Seigneur a dit : Bon et fidèle serviteur, entre dans la joie de ton maître.

Si tu compares Joseph à tout le reste de l'Église du Christ, n'est-il pas l'homme particulièrement choisi, par lequel et sous le couvert duquel le Christ est entré dans le monde de façon régulière et honorable ? Si donc toute la sainte Église est débitrice envers la Vierge Marie parce que c'est par elle qu'elle a pu recevoir le Christ, après elle, c'est à saint Joseph qu'elle doit une reconnaissance et un respect sans pareil.

Il est en effet la conclusion de l'Ancien Testament : c'est en lui que la dignité des patriarches et des prophètes reçoit le fruit promis. Lui seul a possédé en réalité ce que la bonté divine leur avait promis.

Certes, il ne faut pas en douter : l'intimité, le respect, la très haute dignité que le Christ pendant sa vie humaine portait à Joseph, comme un fils à l'égard de son père, il n'a pas renié tout cela au ciel, il l'a plutôt enrichi et achevé. Aussi le Seigneur ajoute-t-il bien : Entre dans la joie de ton maître . Bien que la joie de l'éternelle béatitude entre dans le cœur, le Seigneur a préféré dire : Entre dans la joie de ton maître , pour faire comprendre mystérieusement que cette joie ne sera pas seulement en lui, mais qu'elle l'enveloppera et l'absorbera de tous côtés, qu'elle le submergera comme un abîme infini.

Souviens-toi de nous, bienheureux Joseph, intercède par le secours de ta prière auprès de ton Fils adoptif ; rends-nous propice également la bienheureuse Vierge, ton épouse, car elle est la mère de celui qui, avec le Père et le Saint-Esprit, vit et règne pour les siècles sans fin. Amen.

SERMON