Edmond Campion

( 1581)

Bienheureux, Jésuite, martyr en Angleterre

Fête le 01.12

Bien cher Ami de l'Abbaye Saint-Joseph,

 Londres, le 20 novembre 1581. Le jury vient de rendre son verdict: le Père Édmond Campion et plusieurs de ses complices, jugés coupables de haute trahison, sont condamnés à la pendaison et au dépècement de leurs corps. Campion chante sa joie: «Te Deum laudamus, Te Dominum confitemur (Nous vous louons, Dieu, nous vous confessons, Seigneur).» Son confrère Sherwin poursuit: «Hæc est dies quam fecit Dominus, exultemus et lætemur in ea (C’est le jour qu’a fait le Seigneur, exultons, réjouissons-nous).» Campion, le visage calme, déclare avec noblesse au nom de tous: «Ce n’est pas la mort que nous craignons. Nous savons que nous ne sommes pas les maîtres de nos vies... Voici la seule chose que nous ayons à dire maintenant: en nous condamnant, vous condamnez vos propres ancêtres – tous les anciens prêtres, évêques et rois – tout ce qui était autrefois la gloire de l’Angleterre, l’Île des saints, l’enfant le plus dévoué du Siège de Pierre. Qu’avons-nous enseigné, en effet – même si vous le qualifiez du terme odieux de trahison –, qu’avons-nous enseigné qu’ils n’aient tous prêché? Être condamné pour avoir parlé comme ces lumières – non seulement de l’Angleterre, mais du monde entier – est à la fois une joie et une gloire pour nous. »

Édmond Campion est né à Londres le 25 janvier 1540. À l’âge de neuf ou dix ans, il est placé en apprentissage chez un commerçant. Mais voyant ses capacités intellectuelles, ses parents décident de l’inscrire à l’école pour qu’il apprenne la grammaire. Ses dons exceptionnels le font désigner, quelques années plus tard, le 30 septembre 1553, pour prononcer le discours d’usage lors de la procession du couronnement de la reine Marie Tudor. En 1557, le jeune Édmond est admis comme élève au collège Saint-Jean-Baptiste tout récemment fondé, où il acquiert une maîtrise de la parole qui le fera considérer comme l’homme le plus éloquent de son temps.

Un “diamant de l’Angleterre”

En 1558, la reine Marie meurt et Élisabeth Tudor lui succède. Durant les premières années de son règne, elle arbore une certaine tolérance religieuse; mais par la suite, la souveraine imposera d’une main de fer dans tout le royaume la religion anglicane, compromis entre le régalisme schismatique d’Henri VIII et le protestantisme luthérien. Il est exigé des étudiants, au moment de recevoir le baccalauréat, qu’ils reconnaissent par serment la souveraineté spirituelle de la reine. Les talents du jeune Campion lui ont donné le goût du succès et des applaudissements; aussi consent-il à prêter ce serment. En 1566, il est reçu maître ès arts. Il devient à Oxford un professeur si apprécié que ses élèves sont fiers de s’appeler “Campionists”. Lors d’une visite de la reine à l’université, il est choisi pour prendre la parole devant elle. La souveraine est favorablement impressionnée par ce discours, et le secrétaire d’État, Sir William Cecil, n’hésite pas à appeler Campion l’un des “diamants de l’Angleterre”. Édmond exerce pendant un temps à l’université le rôle de censeur, ce qui le place immédiatement après le vice-chancelier. La faveur du monde n’empêche pas le jeune homme d’être également apprécié pour ses vertus: pureté, humilité, modestie.

Dans son cœur, Édmond est catholique et il désapprouve la nouvelle religion. Son esprit est tiraillé entre le succès que lui offre le monde et la voix de sa conscience; mais il temporise. Une rencontre l’y encourage, celle de l’évêque de Gloucester, Richard Cheney. Seul parmi les évêques élisabéthains, celui-ci veut rester fidèle à la foi de ses pères; cependant, il ne rompt pas avec l’Église anglicane, et s’applique à conserver son évêché, dans l’espoir d’exercer une bonne influence. Animé par ce même esprit de compromis, Édmond accepte, au printemps de 1569, de recevoir l’ordre du diaconat dans l’Église anglicane. À compter de ce jour, il est pris d’un remords qui ne lui laisse aucun répit. Malgré les pressions exercées par diverses personnes, il refuse constamment d’être ordonné prêtre anglican et sollicite la permission de quitter le pays pour quelque temps. En septembre 1570, il quitte Oxford et se rend en Irlande.

À Dublin, Campion peut librement pratiquer la foi catholique. Il profite de quelques mois de tranquillité pour écrire une Histoire de l’Irlande. Cependant, la reine d’Angleterre réussit à imposer la domination britannique ainsi que l’anglicanisme sur l’Île d’Émeraude. Campion, recherché par les autorités anglaises, décide de rentrer incognito au pays natal. Il s’embarque sur un navire en partance pour l’Angleterre. Des officiers anglais montent à bord et annoncent qu’ils recherchent un certain Édmond Campion. Terrifié, celui-ci n’essaie même pas de se cacher: tant que dure la perquisition, il attend paisiblement sur le pont, tout en invoquant saint Patrick, dont il a emprunté le nom pour ne pas se faire reconnaître. De tous les passagers, lui seul n’est pas fouillé. Il attribue cette protection au grand apôtre de l’Irlande.

Le collège de Douai

De retour en Angleterre, Édmond trouve le pays en feu: l’excommunication de la reine par le Pape saint Pie V ainsi que l’insurrection des catholiques dans le Nord ont provoqué une persécution sanglante. Devant cette situation, Campion décide, en juin 1571, de rejoindre le collège anglais à Douai, ville de la Flandre espagnole qui deviendra française un siècle plus tard. Ce collège a été fondé en 1568 afin de donner aux jeunes Anglais l’éducation catholique qu’ils ne pouvaient plus recevoir sur le sol natal; Campion y retrouve d’anciens amis. La formation intellectuelle y est très solide. L’étude des Saintes Écritures revêt une importance primordiale pour rendre les étudiants aptes à répondre aux protestants qui prétendent fonder leur foi uniquement sur la Bible. Sous le règne d’Élisabeth, le collège de Douai formera 450 prêtres, dont 135 mourront martyrs. Édmond y passe deux années. Le climat propice du collège le porte à regretter d’avoir reçu le diaconat dans l’Église anglicane. Conscient de la gravité de son péché, il embrasse une vie pauvre et pénitente, et ne tarde pas à solliciter son entrée dans un ordre religieux. Son choix se porte sur la Compagnie de Jésus.

Au printemps de 1573, il se rend à Rome, où il demande à être reçu comme novice jésuite. Il est accepté et confié à la province d’Autriche. Le temps du noviciat, qui est de deux ans, s’ouvre par un mois de retraite selon les Exercices spirituels, puis le novice passe un mois dans un hôpital au service des malades et un autre mois en pèlerinage en vivant d’aumônes; enfin on l’emploie durant un mois à catéchiser les enfants et les ignorants. Au cours de l’été 1575, le noviciat achevé, Édmond prononce les trois vœux religieux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance. Après avoir complété ses études, il reçoit, en 1578, des mains de l’archevêque de Prague, les ordres sacrés du diaconat et du sacerdoce.

Cependant, Édmond n’a pas perdu de vue sa patrie où sévit la persécution. Dans une apparition, la Sainte Vierge lui révèle qu’il y versera son sang pour la foi. À Douai, on souhaite envoyer des prêtres anglais en Angleterre, afin de secourir les catholiques restés fidèles à la foi de leur Baptême. Les Pères Édmond Campion et Robert Persons, désignés pour cette mission dangereuse, se rendent d’abord à Rome. Le 18 avril 1580, un groupe de douze Anglais, dont trois jésuites, quitte la Ville éternelle, après avoir reçu la bénédiction du Pape. Le 31 mai, ils arrivent à Reims, où le collège de Douai a été transféré deux ans auparavant. Les dernières nouvelles d’Angleterre montrent que l’île est devenue un séjour extrêmement périlleux pour les prêtres catholiques. Mais Campion est résolu: «J’ai fait la libre oblation de moi-même à Dieu, pour la vie et pour la mort, et j’ai confiance qu’il me donnera la grâce et la force pour y être fidèle, et c’est tout ce que je désire.»

Afin de ne pas éveiller de soupçons, les prêtres passeront sur l’île chacun de son côté. En juin 1580, Édmond pose le pied sur le sol natal pour la première fois depuis neuf ans. Partout il y a des espions du gouvernement, et nombreuses sont les personnes disposées à livrer les prêtres. Un gentilhomme catholique emprisonné pour sa foi convainc les deux jésuites de mettre par écrit les raisons de leur venue en Angleterre, afin d’assurer leur défense en justice au cas où ils seraient pris et conduits devant un tribunal. Campion rédige alors un texte connu sous le nom de “Défi de Campion”. Le jésuite y déclare être venu en Angleterre dans l’unique désir de ramener à la foi catholique ceux des fidèles qui en ont été éloignés, et demande de pouvoir s’en expliquer devant les autorités et la reine elle-même, qu’il espère d’ailleurs convertir à la foi de ses ancêtres.

Atteindre le “vrai Jésus”

La foi, nous dit le Pape François, «doit se transmettre au long des siècles. C’est à travers une chaîne ininterrompue de témoignages que le visage de Jésus parvient jusqu’à nous. Comment cela est-il possible? Comment être sûr d’atteindre le “vrai Jésus“ par-delà les siècles? Si l’homme était un être isolé, si nous voulions partir seulement du “moi” individuel qui veut trouver en lui-même la certitude de sa connaissance, une telle certitude serait alors impossible. Je ne peux pas voir par moi-même ce qui s’est passé à une époque si distante de moi. Mais tel n’est pas toutefois le seul moyen dont dispose l’homme pour connaître. La personne vit toujours en relation... Le passé de la foi, cet acte d’amour de Jésus qui a donné au monde une vie nouvelle, nous parvient par la mémoire d’autres, des témoins, et il est de la sorte conservé vivant dans ce sujet unique de mémoire qu’est l’Église. L’Église est une Mère qui nous enseigne à parler le langage de la foi» (Encyclique Lumen fidei, 29 juin 2013, n. 38).

De fait, l’écrit du Père Campion tombera vite entre les mains des hommes de loi, et sera considéré comme une provocation à un débat religieux public. Mais le pouvoir refuse ce débat qui risquerait de remettre en cause le bien-fondé de la réforme religieuse imposée en Angleterre. Les théologiens anglicans craignent les jésuites dont ils connaissent la science et le talent de controversistes.

En octobre 1580, les Pères Persons et Campion se rencontrent près de Londres pour faire le point et dresser un plan d’action. Persons restera près de Londres et Campion, dont le nom est sur toutes les lèvres depuis que son “défi” a été connu, fera le tour des comtés qu’il n’a pas encore visités. Les deux jésuites se séparent avec émotion car la reine vient d’édicter contre eux un mandat d’arrêt nominal. Le Parlement anglais aggrave les peines contre les délits touchant à la religion; il déclare que la conversion à la foi catholique et la réception de l’absolution par un prêtre catholique sont des actes de trahison passibles des peines les plus graves.

Dix raisons

Dans le but de fortifier la foi des catholiques du royaume, Campion rédige un livre qui sera publié en juin 1581 sous le nom de Rationes decem (Dix raisons). L’auteur y donne dix raisons fondamentales pour lesquelles le protestantisme ne peut être vrai, en développant cinq grands thèmes: la Sainte Écriture, les Pères de l’Église, les Conciles, la visibilité de l’Église, les incohérences des positions protestantes. La Sainte Écriture, remarque-t-il, nous a été donnée par l’Église qui, sous la lumière du Saint-Esprit, a discerné quels livres ont été inspirés par Dieu. Or, les protestants rejettent certains livres de la Bible reçus depuis des siècles dans la chrétienté. C’est ainsi, par exemple, que Luther qualifie l’épître de saint Jacques d’«épître de paille», parce qu’elle affirme, à l’encontre de la doctrine luthérienne, que la foi ne suffit pas pour le salut, mais qu’il faut aussi accomplir de bonnes œuvres. Au sujet des Pères de l’Église, Campion donne plusieurs exemples du rejet de leur autorité par les réformateurs. Il démontre que l’enseignement des Pères conduit au catholicisme; si on ne l’accepte pas, on ne peut pas même être chrétien.

Campion montre ensuite que les réformateurs n’ont jamais accepté de prendre part au concile de Trente (1545-1563) alors même qu’on les y invitait, et qu’ils rejettent le témoignage des conciles œcuméniques. «Si l’Esprit de Dieu brille sur l’Église, écrit-il, le moment le plus favorable pour envoyer son secours divin est certainement lorsque la plus grande maturité de jugement, la plus grande science et sagesse, la dignité de toutes les Églises de la terre sont réunies ensemble dans une ville.» Enfin, selon les protestants, la véritable Église du Christ est restée cachée durant de nombreux siècles; en conséquence l’Église, par essence, ne serait ni visible ni repérable. Pour les catholiques au contraire, l’Église du Christ est par nature une société visible, facilement reconnaissable par tous. C’est la cité placée sur une montagne qui doit illuminer le monde, et qui, pour cela, ne peut être cachée (cf. Mt 5, 14). Dans la dernière partie du livre, le jésuite attire l’attention sur les nombreuses contradictions des réformateurs. Ainsi Luther, par sa doctrine de la justification par la foi seule, affirme que le chrétien est à la fois juste devant Dieu et souverainement détestable puisque ses péchés ne sont pas remis mais seulement recouverts. Calvin, par sa doctrine sur la prédestination, rend Dieu responsable de la damnation. Le livre d’Édmond Campion connut un très grand succès, et fut traduit en de nombreuses langues. Il est encore édité de nos jours.

Peu de temps après cette publication, tandis que Persons regagne la France, Édmond accepte l’invitation pressante d’une famille catholique à Lyford. Mais là, un traître le dénonce: capturé le 17 juillet 1581, il est transféré à la Tour de Londres quelques jours plus tard. La reine et son gouvernement sont persuadés que lui et les autres jésuites sont des agents de la papauté et des puissances étrangères envoyés en Angleterre pour renverser la couronne britannique. Le Père Campion est d’abord enfermé dans une cellule minuscule où il ne peut se tenir debout, ni s’allonger; il est ensuite mis tout à fait au secret, dans une pièce éclairée seulement par une petite ouverture située au sommet d’un étroit conduit.

Une résistance à toute épreuve

Le 25 juillet, il comparaît devant trois membres du conseil royal qui le reçoivent avec courtoisie et lui demandent les vraies raisons de sa venue en Angleterre. Le jésuite affirme que ses motifs sont purement religieux, nullement politiques, et il reconnaît la reine Élisabeth comme souveraine légitime du royaume. À la suite de cette entrevue, on fait courir le bruit que le prisonnier est sur le point de renoncer au catholicisme pour se faire anglican; on lui offre même un évêché. Mais devant sa résistance, on le soumet à la torture pour savoir s’il est complice des efforts de l’Espagne pour renverser Élisabeth, et pour obtenir qu’il révèle le nom des personnes qui l’ont hébergé ou ont fait appel à son ministère. On sait, par une lettre privée écrite le 6 août par un membre du gouvernement, que Campion a refusé tout aveu. Pourtant, le conseil royal fait diffuser partout la nouvelle que le prisonnier a dénoncé tous ses complices et a même révélé le contenu des confessions qu’il a entendues. La réputation d’Édmond en est gravement compromise.

Les autorités veulent aussi montrer à la face du monde que son livre Rationes decem n’est pas conforme à la vérité de l’Évangile. À quatre reprises, le Père est confronté à des théologiens anglicans. Ceux-ci s’efforcent de réfuter ses écrits. L’accusé n’a ni les moyens de se préparer (on ne lui concède aucun livre sauf la Bible, alors que ses adversaires ont la liberté de consulter tous les ouvrages théologiques), ni la possibilité de poser des questions à ses contradicteurs. Il est, de plus, physiquement épuisé en raison des tortures qu’il a subies. Lors d’un de ces débats, la torture l’a réduit à une telle impuissance qu’il ne peut même pas lever les bras; un des assistants, dans un geste de charité chrétienne, lui porte à la bouche un verre d’eau. Édmond parvient toutefois à répondre à toutes les questions et à mettre ses adversaires dans l’embarras. Il démontre, en particulier, qu’ayant rejeté l’autorité de l’Église, les réformateurs sont devenus incapables de s’entendre sur les vérités de la foi.

Saint Léon le Grand affirmait: «Si la foi n’est pas une, elle n’est pas la foi», ce que le Pape François, dans son encyclique Lumen fidei, commente ainsi: «Quel est le secret de cette unité ? La foi est une, en raison de l’unité du Dieu connu et confessé... En outre, la foi est une parce qu’elle se réfère à l’unique Seigneur, à la vie de Jésus... Enfin, la foi est une parce qu’elle est partagée par toute l’Église... Au service de l’unité de la foi et de sa transmission complète, le Seigneur a fait à l’Église le don de la succession apostolique. Par elle, la continuité de la mémoire de l’Église est assurée, et il est possible d’atteindre avec certitude la source pure d’où surgit la foi» (nn. 47 et 49).

L’assistance de l’Esprit Saint

Des témoins affirmeront que la lucidité des réponses de Campion, en dépit de la faiblesse de son corps, constitue à elle seule une preuve tangible de l’assistance de l’Esprit Saint. De nombreux catholiques, qui assistent à la confrontation, s’aperçoivent que les informations diffusées pour salir la réputation du Père sont fausses.

La motivation religieuse de la condamnation d’Édmond et de ses compagnons est rendue manifeste par son propre témoignage: «On offrit de nous libérer si nous venions au temple pour entendre des sermons et la prédication de la Parole.» Cependant, condamner à mort pour ses convictions religieuses un homme universellement connu aurait scandalisé toute l’Europe. Aussi, cherche-t-on à lui faire avouer qu’il ne reconnaît pas la légitimité de la reine Élisabeth et qu’il a pris part à des menées politiques contre le royaume. Un document est fabriqué de toutes pièces pour prouver qu’en compagnie de plusieurs autres catholiques, Campion a non seulement refusé la souveraineté d’Élisabeth mais a aussi comploté pour l’assassiner.

Le 20 novembre, fête de saint Édmond, roi et martyr, après seulement une heure de délibération du jury, le Père Campion et ses confrères sont condamnés à mort. Le vendredi 1er décembre, trois d’entre eux (les Pères jésuites Édmond Campion, Ralph Sherwin et Alexander Briant) sont conduits hors de la Tour de Londres. Édmond salue la foule: «Que Dieu vous sauve tous! Que Dieu vous bénisse, et fasse de vous tous de bons catholiques!», puis il se met à genoux, tourné vers l’est, et prie comme Jésus au Calvaire, en disant: «In manus tuas, Domine, commendo spiritum meum (Seigneur, je remets mon âme entre vos mains).» Peu avant de mourir, il récite le Credo et le Pater. Enfin on lui suggère de demander le pardon de la reine: «En quoi l’ai-je offensée? En cela je suis innocent. J’ai prié pour elle et le fais encore maintenant.» Il ajoute ces dernières paroles: «Je meurs en vrai catholique.»

Sous les pontificats des Papes Léon XIII et Pie XI, 199 martyrs anglais et gallois ont été béatifiés, dont 40 ont été canonisés par Paul VI en 1970: ces derniers sont fêtés ensemble chaque année le 25 octobre. Parmi eux, Édmond Campion brille par sa haute intelligence, sa contagieuse bonté, son ardente énergie et sa douceur. C’était un homme de génie, mais aussi un très grand saint qui a renoncé à une belle carrière mondaine pour souffrir avec le Christ. Il avait appris l’humilité du fondateur de son Ordre, saint Ignace de Loyola, pour lequel le sommet de cette vertu et de l’union à Dieu est atteint lorsqu’on désire «les opprobres avec Jésus-Christ rassasié d’opprobres, plutôt que les honneurs, être regardé comme un homme inutile et insensé, par amour pour Jésus-Christ, qui le premier a été regardé comme tel, plutôt que de passer pour un homme sage et prudent aux yeux du monde» (Exercices spirituels, 167).

Que ce saint martyr nous obtienne la grâce d’un zèle ardent pour la vérité afin que, nous aussi, nous puissions lui rendre témoignage et manifester ainsi au monde la charité du Christ!

 Dom Antoine Marie osb, abbé

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